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lun. 28 févr.

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Montpellier

Texte libre, croquez les mots...

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Heure et lieu

28 févr. 2022, 19:00

Montpellier, 2 Pl. Pétrarque, 34000 Montpellier, France

À propos de l'événement

Pochade parisienne...

Tout d’abord l’odeur, cette bouffée anorganique, ferreuse du bitume humide, pétrole pétrifié et sale épandu sur les beaux pavés gris piqués de mica que l’Etat redoute trop quand ils volent au souffle des contestations ou pis encore soupçonnés de cacher sous leurs alignements au cordeau une plage dangereuse pour la concentration des travailleurs . Passé le porche de la gare et les assauts des taxis clandestins qui ne manquent pas devant mon refus agacé de me renvoyer à ma condition de femme et donc de championne du trottoir, je file à la chasse au bus et, postée sous le crachin, à bonne distance d’un clodo bourré et graillonneux, suppute retards, manifs ou grêves subites devant le panneau annonçant le prochain passage dans une trentaine de minutes bien tassées . Enfin grimpée dans la machine bondée, je trace un chemin cahotant vers quelques centimètres carrés libres, ma modeste valise tenue en pare-buffle, éveillant grognements hostiles ou regards vitreux et je perçois bien le rêve d’ailleurs qu’éveille sa vue dans cette foule nerveuse et peu amène . Rescapée des arrêts pilés net, des virages tanguants infligés par une conductrice ou son pendant masculin hystérisée sans doute par une vie privée dont on ne veut surtout rien savoir, me voici larguée bien loin de mon arrêt favori pour cause de travaux, grèves etc.( voir plus haut ) , je me mets donc en chemin traînant ma valise en un gymkana habile entre déjections de pigeons ou chiens et crachats virils . Après avoir franchi le dernier boulevard guettant telle une suricate épileptique les trottinettes à contresens, les vélos tournant soudain à droite et les deux-roues à gauche, les taxis électriques qui vous roulent dessus sans bruit ni coup férir, les bagnoles excédées visiblement dépourvues de freins et les bus qui par principe, ont toujours raison , bref disais-je, passée cette frontière de bruit et de fureur, j’arrive enfin dans mon quartier, méli-mélo de petites rues, village sans clocher aux contours indéfinis mais dont les habitants savent bien ce qui les distingue du territoire voisin . Vite un café dans mon rade favori, le bruit, l’odeur du perco et l’accent parigot grasseyant du taulier, les pochetrons du comptoir et les bobos accrochés à leurs ordis, les meufs volubiles, rieuses et sans pitié qui passent des performances de leur dernier mec à la petite robe noire trop super aperçue pas loin ; sur son seuil, le charcutier me hèle et narre les dernières frasques de son amant trop jeune, le boulanger tunisien, prix de la meilleure baguette parisienne, écoule son pain bio et supposé tel par une clientèle habituée à être roulée dans toute sorte de farines, la fromagère qui, au prix où elle les vend, a certainement trouvé la poule aux oeufs d’or ; dans le square de la Mairie, les vieux chinois qui, il y a trente ans avaient colonisé et acheté la moitié du quartier alors pauvre et décati, déploient lentement les figures stylisées du Taï Chi Chuan ; Les moineaux asticottent les pigeons trop gras, le zinc des toits s’estompe ton sur ton sur le ciel gris perle , je suis rentrée ...

Géraldine Campbell

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